Un guidon pour demain

 

Au sein du GAL Condroz-Famenne, un atelier de réparation de vélo a ouvert au printemps 2020. Au vu du contexte, le projet, qui réunit mobilité douce et durabilité, était bien parti pour rencontrer un beau succès.

LE PROJET

Le vélo a, sans conteste, été l’une des stars du confinement du début de l’année 2020.  C’est dans ce contexte qu’a été lancée l’asbl « Un guidon pour 2main », un atelier vélo qui propose des vélos d’occasion à la vente, mais aussi la réparation des pannes du quotidien.

A l’origine du projet, le GAL Condroz-Famenne : dans ses projets liés à la mobilité, une partie est consacrée à la sensibilisation au vélo, notamment à travers des formations dans les écoles. Rapidement, la question de la réparation du vélo est apparue : « Si on crève un pneu au milieu de son trajet et qu’on ne sait pas se débrouiller, cela peut-être un frein à l’utilisation du vélo, explique Morgane Renard, chargée de mission mobilité au sein du GAL. Nous avions l’ambition de mettre en place des ateliers de réparation du vélo sur le territoire. » Lors de sa prise de fonction, Morgane a analysé les initiatives déjà existantes sur le GAL. Elle a rapidement entendu parler de l’Atelier Vélo de Havelange : « C’était une aubaine car on pouvait s’appuyer sur des porteurs pour pouvoir mettre en place un projet sur le territoire » développe Morgane. Le GAL a donc décidé d’accompagner le projet afin de l’aider à se déployer, tout en lui permettant d’être rapidement autonome.

L’asbl « Un guidon pour 2main » est donc venue prendre le relais d’un atelier de réparation qui existait déjà, dans une Maison de Jeunes de Havelange : « L’asbl qui a été créée a repris les buts de l’atelier vélo initial, qui était vraiment de permettre à des jeunes qui n’ont pas accès à des vélos de pouvoir acheter des vélos à bas prix » précise Frédéric Pirnay, bénévole au sein de l’asbl. En plus de la vente de vélos d’occasion, ils proposent également des réparations à petits prix, et (en dehors de la période COVID) permettent aux cyclistes d’assister à la réparation de leur vélo. 

Car l’enjeu de l’atelier vélo va plus loin que la « simple » réparation de vélo, c’est véritablement l’autonomie du cycliste qui est au centre des préoccupations des bénévoles : « On essaie que les gens assistent au moins à la réparation et qu’ils voient comment on fait, précise Frédéric Pirnay. Ou qu’ils le fassent même eux-mêmes avec notre assistance. Un vélo cassé reste souvent sur le côté, on finit par oublier que le vélo est là, et on finira par le jeter. L’idéal est que les personnes puissent avoir toujours un vélo en état de fonctionnement de façon à ce qu’il soit utilisé à chaque fois qu’on en a besoin. »

La porte est ouverte, quelqu’un va s’arrêter parce qu’il a un problème peut-être mineur, mais embêtantIl s’imagine que c’est quelque chose de plus grave, qui va lui coûter cher et donc ne le fait pas réparer. Et comme la porte est ouverte, il vient voir et demande si cela lui couterait cher de le faire réparer et parfois en deux minutes c’est réglé !

Didier Dekoster

Autant dire que le succès à tout de suite été au rendez-vous lors de l’installation de l’Atelier à Hamois : « On a bénéficié de la crise covid qui a généré une forte demande dans le milieu du vélo, précise Frédéric. On est comme tout le monde, débordés par le travail. (…) Certains réparateurs débordés nous renvoient des clients, les gens qui ont des vélos trop vieux ou trop dépassés. » Parce qu’il n’est évidemment pas question de faire une concurrence déloyale aux vélocistes professionnels : « On refuse, pour ne pas faire concurrence aux indépendants, de vendre des pièces neuves pour des gens qui ne viendraient pas réparer ici, insiste Frédéric. Le but c’est que tout le monde utilise le vélo, et que des gens qui ne savent pas aller acheter un vélo chez le vélociste puissent en avoir ici. Je pense que c’est très complémentaire et j’espère que c’est bien compris. » Morgane Renard complète : « C’est un projet à finalité sociale contrairement au vélociste » et l’atelier vélo va notamment réaliser des petites réparations qui sont parfois une perte de temps pour le vélociste.

 Et en pratique, comment peut-on faire réparer son vélo ? « On a un jour d’ouverture officiel, le mercredi de 17h à 20h, explique Didier Dekoster. Pour le moment, on ouvre aussi le samedi matin (10h-12h/13h). » Quant au prix, ils sont très bas, 5€ de l’heure, puisque les l’équipe est bénévole, et qu’ils travaillent à 90% avec des pièces de récupération.

C’est grâce à cette offre alternative que le GAL espère encourager au maximum la mobilité douce au sein de ses communes : non seulement en remettant en selle un public qui n’a pas nécessairement les moyens d’acheter un vélo neuf, mais aussi en évitant qu’un vélo avec une petite panne ne soit remis dans un garage, et oublié. Car c’est là aussi un des grands freins à l’utilisation du vélo : beaucoup de personnes commencent et s’arrêtent subitement à cause d’une petite panne inexpliquée, dont ils n’ont pas le temps de s’occuper. L’asbl répond directement à ce frein : « La porte est ouverte, quelqu’un va s’arrêter parce qu’il a un problème peut-être mineur, mais embêtant, raconte Didier. Il s’imagine que c’est quelque chose de plus grave, qui va lui coûter cher et donc ne le fait pas réparer. Et comme la porte est ouverte, il vient voir et demande si cela lui couterait cher de le faire réparer et parfois en deux minutes c’est réglé ! »

L’un des principaux freins lorsqu’un GAL lance un projet ? La pérennisation de celui-ci. Par essence, un Groupe d’Action Locale a une durée de vie limitée, et doit, avant même son lancement, penser à l’avenir des projets qu’il initie. Un obstacle que le Groupe d’Action Locale Condroz-Famenne a réussi à franchir, notamment via la création d’une asbl : l’association ne dépend pas exclusivement du GAL, et sa survie est « assurée » grâce aux achats et réparations effectuées au sein de l’Atelier. Et si on espère que les cyclistes qui fréquentent l’atelier vélo sauront rapidement réparer leurs crevaisons, nous ne doutons pas que le projet a un bel avenir devant lui !

  

Et pourtant, ce n’est pas toujours facile de motiver le public pour qu’il apprenne à réparer soi-même son vélo : c’est le constat un peu amer que tire Didier Dekoster, réparateur bénévole au sein de l’association. « La plus bête panne qu’on puisse avoir en vélo et qui vous handicape le plus c’est une crevaison, explique Didier. Ce n’est rien du tout mais vous êtes bloqué. Les trois-quart des pannes qu’on a réparées ici ce sont des crevaisons. Comment se fait-il qu’il n’y ait pas plus de gens qui savent mettre une rustine, réparer une chambre à air ? Est-ce que c’est parce que les gens se disent qu’on est tellement bon marché et que pour 5€ [NDLR : tarif facturé par l’asbl pour 1h de travail] on ne va pas se salir les mains ? Mais ce n’est pas la question de se salir les mains mais bien de pouvoir se tirer d’embarras quand on est seul ! » Il rappelle au passage qu’on « ne crève pas toujours dans son garage, rarement même ! » Morgane Renard, la chargée de mission du GAL, relativise néanmoins : « L’atelier a démarré en même temps que la crise sanitaire, et le seul service que nous pouvions proposer était le dépôt du vélo. […] Nous avons organisé une formation à la réparation du vélo durant la semaine de la mobilité, et celle-ci était complète. C’est difficile de dresser un constat… »

L’un des points forts de l’Atelier de réparation « Un guidon pour 2main » est de penser son activité en termes de durabilité, notamment via la récupération et la remise en état de vélos mis au Parc à container :  « L’atelier vélo, au temps du Foyer des jeunes, a été le premier atelier de Wallonie à avoir l’accès à la récupération des vélos jetés dans les Parcs à containers, se rappelle Frédéric Pirnay. Une chance pour nous est d’avoir pu développer directement cette collaboration avec le BEP. » Lorsque des vélos sont jetés dans les Parcs à containers de Hamois ou Havelange, ils sont mis de côté et l’Atelier vélo vient les récupérer. « Parmi tous les Ateliers vélos on a vraiment été le premier à pouvoir disposer de ce genre de possibilités, » souligne Frédéric. Les bénévoles peuvent ensuite revendre des vélos réparés à petit prix (entre 25 et 100 € le vélo), et bénéficier de nombreuses pièces détachées pour les futures réparations. « Le but principal est de favoriser l’utilisation du vélo par tous les moyens en récupérant des pièces et en évitant que des vélos soient jetés et passent à la broyeuse » souligne Frédéric.

La plus bête panne qu’on puisse avoir en vélo et qui vous handicape le plus c’est une crevaison. Ce n’est rien du tout mais vous êtes bloqué.

Didier Dekoster

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GALERIE

Découvrez les photos du projet

Ce projet est possible grâce au financement du FEADER, notamment à la Mesure 19 – LEADER (GAL Condroz-Famenne) du Programme wallon de Développement rural, co-financée par la Wallonie et l’Europe.

Découvrez-en plus sur le Programme wallon de Développement Rural et son réseau :
www.reseau-pwdr.be