Mon beau sapin,

roi des Ardennes

 

Les sapins de Noël sont présents dans presque tous les foyers belges en fin d’année. Mais saviez-vous que 85% des parcelles de sapins de Noël sont situées dans le sud de la Belgique ? Trois Groupes d’Action Locale issus de ce territoire ont décidé de se rassembler afin de les accompagner vers la suppression des produits phytosanitaires (herbicides, insecticides, …). Rencontre avec Guy Labbé, sylviculteur à Orchimont, à la découverte de pratiques respectueuses de l’environnement.

LE PROJET

Ils embaument, décorent et égayent nos maisons durant le mois de décembre : les sapins de Noël sont pour beaucoup de Belges un achat incontournable de la fin d’année. Pourtant, peu de personnes savent qu’il existe une façon de les produire plus respectueuse de l’environnement, en n’utilisant plus (ou très peu) de produits dits « phytosanitaires », c’est-à-dire les produits chimiques, comme le glyphosate ou les insecticides, qui permettent de protéger les arbres contre maladies et insectes ravageurs.

C’est l’expérience dans laquelle a décidé de se lancer Guy Labbé, sylviculteur à Orchimont (Vresse-sur-Semois) qui entame sa 45eme saison de sapins de Noël. Si Guy avait déjà réduit son utilisation de « phytos », c’est le projet de coopération des GAL Nov’Ardenne, Ardenne Méridionale et Haute-Sûre Forêt d’Anlier qui aura fini de le convaincre de se passer complètement de produits. Son objectif avec ce projet « Participer à la protection de la nature, de la faune, du biotope, … de la nature en général. »

A l’origine du projet, comme pour tous les projets des Groupes d’Action Locale, une demande de la part des citoyens du territoire: « Tout a d’abord commencé par une consultation citoyenne, pour voir quels étaient les sujets sur lesquels ils voulaient travailler sur le territoire, explique Antonio Ramiez, chargé de mission aux GAL Nov’Ardenne et Ardenne Méridionale. Sur les GAL Nov’Ardenne, Ardenne méridionale et Haute-sûre Forêt d’Anlier les citoyens ont voulu travailler sur le sujet du sapin de Noël. »  

Trois objectifs principaux sont poursuivis dans le projet : réduire l’utilisation d’herbicides, d’insecticides et mieux gérer l’utilisation d’engrais. Comment arriver à ce but ? « On fait ça en mettant en place des couverts végétaux, de différentes variétés, et qui seront gérés soit de façon mécanique, ou par pâturage. » précise le chargé de mission. Ce sont donc trèfle, luzerne et autres plantes qui vont jouer le rôle de protecteur naturel du sapin, permettant de ne plus utiliser d’herbicides et qui « vont également servir de gîte et de couvert pour toute cette petite faune qui va nous aider à protéger les sapins », complète Antonio.

Il ne faut pas non plus que l’agriculteur se sente coupable de quelque chose. On l’a obligé à travailler comme ça, avec des très grandes surfaces, avec de moins en moins de personnel dans les champs, il a été obligé d’utiliser ces méthodes. Comme nous d’ailleurs.

Guy Labbé

Une autre difficulté du projet ? Sa durée. Il faut, en effet, compter entre 5 et 7 ans entre la plantation et la vente d’un sapin de Noël. Or le projet, lancé en mars 2019 verra son financement s’interrompre en 2022 au plus tard. « Parce qu’effectivement trois années c’est trop court pour couvrir la durée totale du cycle de vie ou de production du sapin de Noël. Et forcément c’est au moment de la vente que les producteurs nous diront « Oui, pour le sapin de Noël il est possible de faire du zéro phyto, on a un sapin de qualité, et économiquement le sapin reste rentable » » souligne la chargée de mission du GAL Haute-sûre Forêt d’Anlier. Antonio Ramirez complète : « L’idéal ce serait de pouvoir continuer le projet jusqu’à la commercialisation, et peut-être même aller au-delà, avec peut-être une labellisation d’un produit différencié, avec un prix différencié qui met en valeur le travail supplémentaire. »

Notons que deux des trois GAL coopérant sont des Parcs naturels, et bénéficient donc d’une durée de vie plus longue qu’un GAL, dont les financements s’étendent sur une durée d’environ 6 ans.

S’il n’est pas encore possible de dresser le bilan du projet, un premier état des lieux est déjà envisageable après un peu plus d’un an : « On a les techniques de mise en place, on sait avec quelles machines on doit travailler, on a déjà un premier regard sur quel couvert va peut-être marcher et quel couvert on va d’ores et déjà écarter.  On a une première bonne expérience de la mise en place des couverts végétaux dans les sapins de Noël et comment travailler avec les producteurs. » Quant à l’avenir de ces sapins sans phytos, on espère évidemment les retrouver au sein de vos foyers à l’hiver 2024.

Au final on a été vraiment surpris, de voir comment les producteurs ont envie de s’inscrire dans une démarche de production différenciée, et vraiment d’aller vers une production d’un sapin de Noël qui soit plus respectueux de l’environnement.

Christine Leclercq

Quant à l’utilisation d’engrais, il n’est pas toujours évident pour les sylviculteurs de savoir quand, et en quelle quantité les utiliser : « C’est pour ça qu’on collabore avec le Centre Michamps, pour faire toute une série de prélèvements [ndlr : de sol] dans les parcelles de sapin de Noël de différentes classes d’âge, différents types de gestions, afin de voir quel est vraiment le besoin en azote du sapin à un moment donné. Pour pouvoir apporter le conseil au producteur. Pour apporter la juste dose au bon moment » se réjouit Antonio.

Mais attention à ne pas jeter trop vite la pierre aux agriculteurs et sylviculteurs qui utilisent des produits phytosanitaires et engrais chimiques : « Il ne faut pas non plus que l’agriculteur se sente coupable de quelque chose, déclare Guy Labbé, notre sylviculteur. On l’a obligé à travailler comme ça, avec des très grandes surfaces, avec de moins en moins de personnel dans les champs, il a été obligé d’utiliser ces méthodes. Comme nous d’ailleurs. (…) Il faut que les gens prennent conscience de ce problème. » Si les agriculteurs et sylviculteurs sont prêts à s’engager pour l’environnement et la biodiversité, il est indispensable que le consommateur suive, notamment pour ces sapins de Noël qui seront peut-être moins touffus que les sapins classiques. Les citoyens sont sans doute de plus en plus engagés dans leurs achats, mais il faut que la tendance augmente : « On s’en rend bien compte avec ce qui vient de se passer [ndlr : la crise du coronavirus]. Les petits maraîchers qui ont bien vendu, qui ont bien travaillé pendant 2 mois, maintenant on commence déjà à les laisser de côté. »

Dans ce projet, la coopération entre les 3 Groupes d’Action Locale était cruciale, comme l’explique Christine Leclercq, chargée de mission au GAL Haute-sûre Forêt d’Anlier : « Il faut savoir que Neufchâteau, c’est un peu le berceau du sapin de Noël. Ce berceau s’est étendu sur les communes voisines. Grâce à la coopération entre les GAL partenaires, on couvre 90% de la production du sapin de Noël sur nos territoires [ndlr : soit environ 57% de la surface totale en Wallonie]. C’est vraiment le territoire idéal pour mener des tests de ce genre. » 

Si le projet est maintenant sur les rails, l’une des étapes les plus difficiles fut de trouver des producteurs qui accepteraient de mener directement les essais sur leurs parcelles. C’est grâce au soutien de l’Union Ardennaise des Pépiniéristes (UAP) que les GAL ont pu rencontrer les sylviculteurs. Il a fallu « établir une relation de confiance, voir comment [les producteurs­] allaient pouvoir s’inscrire dans un projet, n’étant nous-mêmes pas du tout des spécialistes du sapin de Noël, précise Christine Leclercq. (…) Et au final on a été vraiment surpris, de voir comment les producteurs ont envie de s’inscrire dans une démarche de production différenciée, et vraiment d’aller vers une production d’un sapin de Noël qui soit plus respectueux de l’environnement. » 

 

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 « Grâce à la coopération entre les GAL partenaires, on couvre 90% de la production du sapin de Noël sur nos territoires [ndlr : soit environ 57% de la surface totale en Wallonie]. C’est vraiment le territoire idéal pour mener des tests de ce genre. »

– Antonio Ramirez, chargé de mission GAL

GALERIE

Découvrez les photos du projet

Ce projet est possible grâce au financement du FEADER, notamment à la Mesure 19 – LEADER du Programme wallon de Développement rural, co-financée par la Wallonie et l’Europe.

Découvrez-en plus sur le Programme wallon de Développement Rural et son réseau :
www.reseau-pwdr.be